Histoire d'une photo

Histoire d’une Photo #5

Windblown Jackie de Ron GALLELA : Les paparazzi

Le film « La dolce vita », Fellini, Mastroianni et Coriolano Papparazzo, personnage secondaire qui accompagne le héros toujours équipé d’un appareil photo. De là provient le terme de Paparrazzi (pluriel de paparazzo). Il s’agit de photographes qui shootent la vie privée de gens célèbres.
1970, la presse people se développe, les célébrités deviennent des stars et un style de photographes nait. Ron Gallela  en sera un des pionniers et probablement le plus célèbre. Etre là au bon moment nécessite un excellent réseau d’informateurs, de la patience, une solide sante (beaucoup d’insultes et de coups…) mais c’est le prix de la notoriété photographique.

Windblown Jackie montre une jeune femme, marchant sur un trottoir qui regarde le photographe avec un sourire quasi énigmatique. Elle tient une paire de lunette de soleil à la main et ses cheveux sont à la merci du vent. Il s’agit de Jackie Kennedy. Nous sommes le 7 octobre 1971 en fin d’après midi, Madison avenue à New York.
Gallela raconte qu’il vient de finir un shooting avec un mannequin et qu’il prend un taxi pour tenter de photographier Jackie Kennedy qu’il vient de surprendre par hasard en ville. C’est son obsession, sa golden girl. Caché derrière le véhicule, il la cadre et, le chauffeur de taxi prend une initiative heureuse en donnant un coup de klaxon qui fait se retourner la star. Clic clac. Un brin surprise et amusée, l’image est une pépite de naturel.  Le photographe reconnu, la dame se fermera et mettra ses lunettes qu’elle avait toujours sur elle pour cacher son visage. Cette photo vaudra à son auteur 2 procès et l’interdiction de s’approcher de la célébrité ou de sa fille à moins de 150 m.
Propriété de « Wire image » spécialisée dans les images de stars, filiale de « Getty image ». Données exif non retrouvées.

 

Photo NetB en format portrait dans ce que l’on appelle un plan américain (mi-cuisse) prise à grande ouverture.
Deux plans : le fond un peu flouté révélant une rue avec des voitures garées et des immeubles et le sujet principal, net en avant plan. C est comme si le personnage avait été « photoshopé » dans ce décor.
Fait marquant, les contrastes de NetB se complètent : la chevelure noire avec l’imeuble blanc, son pull gris avec la voiture blanche et son pantalon plus soutenu que le trottoir.
La prise de vue est centrée, plein axe un peu floue car dans le mouvement.
La pose est de profil, exactement au bon moment, bras et jambes en triangle maxi et opposés. Le visage se trouve de face par rapport au photographe. Il attire le regard par ses cheveux au vent, son sourire à la Mona Lisa et un regard qu’on peut qualifier de connivence. La tenue est simple (pantalon et pull), non apprêtée, sans artifice  mais superbement féminin et intemporel. Une beauté naturelle.
Jeune veuve du 35eme président des USA et récemment marié depuis 3 ans à Onassis, Jackie faisait toujours de belles apparitions (toujours calculées, protégeant son image et sa famille)  vêtue par les grands couturiers français ou américains. Elle pouvait lancer des modes vestimentaires et une photo d’elle avait forcement du succès, que dire alors d’une image toute naturelle comme celle-ci.
Larry Flint publiera d’ailleurs, 4 ans plus tard, des photos d’elle, nu prises sur l’ile de Skorpios en Grèce. Voyeurisme, c’est là toute la question des people…

La photo de paparazzi  révèle bien le coté privé de la célébrité. Un instant volé, pris sur le vif mais qui, dans ce cas montre tellement de naturel qu’elle en devient presque intime. Hors du contexte de prise de vue on pourrait croire à une pose. Cela rapproche sans doute le sujet de la population qui le regarde, ce qui peut être une clef de son succès.
Jean Luc Gleizes

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